Anne-Marie Carthé
J'ai lu avec beaucoup d'attention l'entretien avec Mounira Chatti. Cela donne vraiment envie de lire ce roman, dur certainement, mais qui pose des questionnements importants. Mounira Chatti
cite
W ou le souvenir d'enfance de Pérec. J'ai souligné dans cet ouvrage, un passage dans lequel Perec parlant de ses parents, dit pourquoi il écrit. Je vous livre ce passage, car il me semble pouvoir
faire lien avec cette nécessité d'écrire pour Mounira Chatti:
"J'écris:J'écris parce que nous avons vécu ensemble, parce que j'ai été un parmi eux, ombre au milieu de leurs ombres, corps près de leur corps; j'écris parce qu'ils ont laissé en moi leur marque
indélébile et que la trace en est l'écriture: leur souvenir est mort à l'écriture; l'écriture est le souvenir de leur mort et l'affirmation de ma vie."
Extrait du journal algérien El WATAN
en date du 10 mars 2012
Par Samira Hadj Amar
" Rencontre avec cette remarquable romancière...
-Dès qu’il y a un débat sur la femme, on pense à Maïssa Bey, alors que vous réfutez totalement l’étiquette de féministe...
De manière générale, je suis contre. J’ai du mal avec les étiquettes. Je n’aime pas du tout lorsqu’on catégorise les gens. Je trouve que la littérature se passe très bien d’étiquettes. Mais on en
a besoin,
ici, comme en France ou ailleurs. Moi, je suis présentée toujours en France comme écrivaine algérienne, militante de la cause des femmes. Souvent, on me le dit. Alors, moi je dis je ne crois pas
du tout que l’écriture se résume seulement à cela : un acte de militantisme. Je pense par exemple à Assia Djebar qui, la première, a dénoncé, et je dis bien a dénoncé, le silence que l’on impose
aux femmes et, pourtant, l’on n’a jamais dit que Assia Djebar est une militante de la cause féminine. Pourquoi ? Parce qu’il se trouve que je suis arrivée à un moment où l’on a eu besoin de
représentation."
La suite de l'entretien sur http://www.elwatan.com/-00-00-0000-162189_159.php
Par Anne-Marie Carthé,
plasticienne
"En te lisant, je suis allée moi aussi vers ma bibliothèque rechercher un passage que j'aime particulièrement et qui se trouve dans Les enfants du nouveau monde:
"Je voudrais atteindre un jour ce point où la réalité est à la fois un champ immense, et comme une terre proche, très proche que je pourrais, à tout moment, ramasser, faire couler dans mes
doigts avec...avec quels sentiment?" s'interrogeait-elle, en tentant de préciser son idéal; elle réfléchissait, cherchait ce qui lui manquait..."avec une très grande attention, car
l'attention aux autres doit être la seule passion inépuisable", terminait elle."
Par Sonia Amazit
La lecture de votre compte rendu du cycle littéraire à
Pompidou m'a touchée. De lire votre déception et votre lassitude à entendre sans cesse les mêmes questions, qui ne cessent d'empiéter les problématiques identito-corporo-culturelles qu'Assia
Djebar soulève dans ses romans, m'a interpellée. J'avoue volontiers de n'avoir pas saisi le sens du débat et de la thématique ce jour. Etait-ce de retracer le parcours de l'auteure ou de
découvrir le sens caché de son écriture ? A première vue, il s'agissait du parcours de l'auteur. Malheureusement!
En revanche, cette première rencontre avec l'auteure fut bouleversante. C'était la première fois que je l'entendais et que je l'apercevais. Je fus émerveillée par sa simplicité lorsqu'elle énonça son parcours, touchée par son émotion lorsqu'elle évoqua son pays et ce qu'il est devenu aujourd'hui, et par sa vulnérabilité lorsqu'elle exprima son besoin d'être rassurée voire d'être sécurisée de l'utilité de son livre. Comment est ce possible, ai-je pensé, qu'une femme de sonenvergure puisse douter de l'utilité de ce roman? J'aurais aimé prendre le micro pour lui exprimer, bien que n'ayant pas lu ce roman, à quel point la rencontre avec ses romans ne cesse de nourrir et d'enrichir chaque jour un passé confus et brisé m'ouvrant ainsi un chemin vers mes origines. Par contre, lorsque j'ai entendu un participant évoquer la légitimité de revendiquer la langue arabe comme langue nationale après l'indépendance, j'ai senti monter une colère en moi. Etant kabyle d'origine, par mes deux parents, j'ai trouvé cette intervention déplacée et hors propos. En tout cas, cela n'a pas gâché le plaisir de découvrir l'auteure en chair et en voix!
Le roman de deux Algérie: "Nulle part dans la maison de mon père"
Max Véga-Ritter
Professeur émérite Université Blaise Pascal
Clermont Ferrand
"Un roman d'une émouvante beauté. La délicatesse s'y allie à la rigueur, l'émotion à la pudeur, l'analyse à l'élan lyrique, l'affection pour la tradition et le passé à la volonté de
liberté.
Toute une Algérie est là dans ces fulgurances sous des apparences roides et retenues. L'auteur nous livre un roman d'éducation féminine à l'époque coloniale, dans une société clivée qui va mourir
dans des soubresauts que l'adolescente ne pressent pas.Assia Djebar d'ailleurs ne se permet pas la facilité dérisoire de la prophétie rétrospective. Simplement, elle lève toute hypothèque sur ses
intentions en livrant en une page tout ce qu'elle pense de la colonisation et de ses méfaits. L'étudiante de École normale Supérieure de filles qui se fit renvoyer pour le soutien qu'elle
apportait à la lutte pour l'indépendance est présente dans la volonté acharnée de liberté de l'héroïne.
Pour poursuivre la lecture de cette très belle critique littéraire, veuillez vous rendre sur le lien : http://dzlit.free.fr/djebar.html#071124